Justice pour nos langues !

Lettre du député Jean-Charles Larsonneur
à Emmanuel Ethis, recteur de l’académie de Rennes,
avec copie à Gabriel Attal, ministre de l’Éducation nationale,
et à Jean-Luc Mennessier, proviseur de la Cité scolaire de l’Iroise

Jean-Charles Larsonneur
Député du Finistère

Monsieur Emmanuel Ethis
Recteur de l’académie de la région académique de Bretagne
Rectorat de Rennes
96 Rue d’Antrain
35700 Rennes

Brest, le 24 juillet 2023

Objet : suppression des options pour les élèves de la filière breton/français au Collège et au Lycée de l’Iroise – Brest

Monsieur le Recteur,

Ar brezhoneg n’eo ket un dibab !

Le breton n’est pas une option !

Je souhaite vous alerter sur la situation des élèves de la filière bilingue breton-français des Collège et Lycée de l’Iroise à Brest. Ces élèves ont appris il y a quelques jours qu’ils n’auraient plus accès à la rentrée prochaine aux multiples options proposées par l’établissement et qu’ils devraient abandonner les options qu’ils suivaient jusqu’à maintenant. Cette décision serait motivée par des questions d’organisation et d’emploi du temps.

Or, le breton n’est pas une option comme les autres mais bien une filière à part entière.

Il n’est pas acceptable que des élèves, dans cet établissement ou dans n’importe quel autre, soient placés dans la situation de devoir arbitrer entre le breton et une ou plusieurs autres options.

Il s’agit d’une discrimination objective par rapport aux élèves n’étudiant qu’en langue française, et le breton ne saurait en aucun cas servir de variable d’ajustement.

Si cette décision ne concerne aujourd’hui qu’un nombre limité d’élèves et de familles, je considère que chaque entaille, chaque renoncement, chaque coup porté aux filières bilingues breton-français est une atteinte à la langue bretonne et à la pérennité de son enseignement dans son ensemble.

Notre langue, Monsieur le recteur, a fait l’objet, au XXème siècle, d’une politique systématique d’éradication au profit du français.

Mon arrière-grand-mère me racontait comme elle se faisait battre à l’école quand elle parlait breton. Ma grand-mère l’a si bien intégré que, quoique bretonnante de naissance et parlant parfois le breton avec mon grand-père ou entre amis, elle ne m’a jamais parlé qu’en français. Ma mère ne parle pas breton. Et je n’en connais que quelques malheureuses bribes, parce que je n’ai pas eu la chance de fréquenter un établissement bilingue.

La République est un bloc, avec toute sa diversité linguistique et culturelle. Son école se tient – encore – debout et fière.

C’est pourquoi je compte sur vous et sur la direction de l’établissement pour trouver rapidement une solution permettant à ces élèves de poursuivre leur apprentissage bilingue tout en suivant les options de leur choix.

Tout recul, tout manquement quant à la mise en œuvre d’une politique active pour faire vivre la langue bretonne, avec les moyens dont vous disposez, fera l’objet d’une démarche similaire de ma part.

Malgré les freins nombreux rencontrés au plan national, il n’est jamais trop tard pour mieux faire au niveau du Rectorat. C’est un combat culturel de longue haleine, un défi collectif, dont je souhaite, dans les limites certes trop étroites posées par notre Constitution, que vous partagiez l’esprit.

Restant à votre disposition pour échanger sur ce sujet, je vous prie d’agréer, Monsieur le Recteur, l’expression de ma considération sincère.

Jean-Charles Larsonneur
Député du Finistère

Copie à :
Monsieur Gabriel Attal, Ministre de l’Éducation nationale et de la Jeunesse
Monsieur Jean-Luc Mennessier, Proviseur de la Cité Scolaire de l’Iroise

Source : « Ar brezhoneg n’eo ket un dibab ! Le breton n'est pas une option ! », Jean-Charles Larsonneur, 31 juillet 2023.