Justice pour nos langues !

Réaction d’Elen à l’arrêt du Conseil d’État
interdisant d’utiliser le corse
dans les procédures de l’Assemblée de Corse
Publication du 08.06.2025, par le Réseau européen pour l’égalité des langues (Elen)

Le Conseil d’État français a enfoncé le clou en allant dans le sens de la décision d’une cour locale interdisant à l’Assemblée de Corse d’utiliser le corse dans ses procédures suite à un recours déposé par l’Assemblée de Corse. Cette décision rappelle que, pour l’État français, le maintien des plus grands fantasmes jacobins parisiens du 19e siècle d’une langue unique, d’un État unique et l’éradication des langues « régionales », c’est la routine habituelle.

Compte tenu de l’absence de progrès politique et de la nécessité constante de poursuivre les procès pour obtenir quelque semblant de droits linguistiques normaux, comme c’est le cas actuellement pour les organisations membres d’Elen en Bretagne et en Catalogne du Nord, il est encourageant de constater que l’avocat du gouvernement corse, Patrice Spinosi, prépare actuellement un recours devant la Cour européenne des droits de l’homme, malgré le piètre bilan de cette juridiction concernant les langues européennes menacées et minoritaires.

Cette décision contraste fortement avec l’approche européenne du 21e siècle en matière de politique linguistique adoptée par l’Espagne voisine et avec son attachement actuel à sa réalité plurilingue, alors qu’elle fait campagne pour l’officialisation du catalan, du basque et du galicien. Aujourd’hui, le ministre des Affaires étrangères, M. Albares, a déclaré : « Pour le gouvernement espagnol, protéger et promouvoir nos langues est donc une obligation, une réponse à ce mandat constitutionnel… La reconnaissance de nos langues n’est pas seulement une obligation, c’est aussi une conviction profondément démocratique et civique. … Le catalan, le galicien et le basque doivent être officiels en Europe… car toutes nos langues sont profondément européennes. »

Entendrons-nous un jour des déclarations similaires de la part des dirigeants français sur le breton, l’occitan et le corse, et la France sortira-t-elle un jour de sa mentalité monolingue et entrera-t-elle dans le 21e siècle en prenant en compte sa propre réalité plurilingue ? Que fera la France lorsque deux langues présentes sur son territoire, le catalan et le basque, deviendront langues officielles de l’UE ? Continuera-t-elle à dénier tous les droits aux locuteurs de ces langues, ainsi qu’au breton et au corse ?

Elen lancera un nouvel appel officiel à l’Onu, qui inclura la nouvelle décision du Conseil d’État ainsi que les violations persistantes de la loi Molac, et soulèvera la question au Conseil des droits de l’homme de l’Onu. Elen élabore actuellement une nouvelle stratégie de campagne pour la protection et la promotion des langues européennes menacées et minoritaires, visant à intervenir notamment auprès des États problématiques et à inciter l’UE à agir pour protéger sa diversité linguistique. Elle sera lancée lors de l’Assemblée générale de Barcelone en novembre.

Source : « The French Conseil d’État has doubled down on a local court ruling that the Corsican Assembly cannot use Corsican in its proceedings following an appeal by the Corsican Assembly », par European Language Equality Network, Facebook, 8 juin 2025, 18 h 27.